Le dernier week-end du mois de mars est traditionnellement celui pendant lequel se déroule le Festival Européen Latin-Grec de Lyon, auquel nous avons la chance de participer depuis plusieurs années étant donné que notre collège est situé tout à côté.

L’édition 2020, reportée à cette année pour les raisons que l’on sait, avait pour thème Les Métamorphoses ou l’Âne d’or, un roman antique écrit par Apulée, auteur kabyle de langue latine.

Bandeau publicitaire du Festival Européen Latin-Grec de Lyon 2021

Une gravure du XVIe siècle représentant la métamorphose de Pamphile en chouette.

Dans ce roman, le personnage principal, le jeune Lucius, se voit métamorphosé en âne bien malgré lui, après avoir espionné la sorcière Pamphile, chez qui il est hébergé lors de son séjour à Hypata, en Grèce, se transformer elle-même en chouette avant de s’envoler dans la nuit noire… Suite à cette scène bouleversante, Lucius va vouloir jouer aux apprentis sorciers et faire de même, mais en manipulant les pommades et les reliques de la magicienne, il va payer pour sa curiosité et finir dans le corps d’un animal à la réputation bien moins flatteuse et attirante !

Panthia et Méroé en train d’égorger le malheureux voyageur, pendant que son compagnon assiste à la scène caché sous des couvertures !

La sorcellerie apparaît dans plusieurs autres passages de ce roman, à travers les récits de différents personnages qui racontent leurs mésaventures : un voyageur a vu son compagnon de route assassiné par les sorcières Panthia et Méroé (égorgé, puis ressuscité façon zombie avant de s’écrouler mort d’un coup), un autre homme a été mutilé par des sorcières un peu trop malicieuses qui lui ont coupé le nez et les oreilles…!

Une figurine d’envoûtement exposée au musée du Louvre (Paris).

La magie noire est donc un thème qui revient souvent dans ce roman que nous avons parcouru, et c’est pourquoi les 5e ont étudié les pratiques de sorcellerie dans l’Antiquité à travers des tablettes archéologiques. Ces tablettes et ces poupées d’argile, qui peuvent faire penser à la magie vaudoue, participent d’une pratique que l’on appelle la « défixion » (« defixus » veut dire « cloué » en latin), car on clouait ces objets pour faire du mal aux victimes ensorcelées…

Des tablettes de défixion exposées au musée des Thermes (Rome), avec leurs maléfices gravés

Les latinistes ont ensuite été invités à se mettre eux-mêmes dans la peau d’une sorcière antique : d’abord en créant leur propre texte de vengeance imaginaire invoquant un dieu ou une déesse des ténèbres, puis en gravant cet envoûtement sur une tablette de métal, comme auraient pu le faire les Romain(e)s avides d’assouvir leur soif de maléfices !

Le travail de Kelly : préparation du texte du sortilège sur du papier calque (ou sulfurisé), puis inscription sur du papier métallique, à la manière des Romains.

Ci-dessus, par exemple, Kelly invoque le dieu Neptune (Poséidon) pour se venger du garçon qui lui a volé son stylo quatre couleurs !

Ci-dessous, à gauche, Alia cherche à obtenir réparation de celui qui lui a volé son téléphone en invoquant Cerbère pour qu’il lui prenne sa main ! Quant à Mayssane (à droite), elle veut venger sa grande sœur à qui on a aussi volé son téléphone, et fait appel pour cela au dieu Mars, le dieu de la guerre…

Les productions d’Alia (gauche) et de Mayssane (droite), elles aussi très réussies : il n’y a plus qu’à y planter un clou et les enterrer près d’une étendue d’eau pour voir si le sortilège est efficace…!
La tablette de défixion de Carla dans une mise en scène évocatrice…

Elèves non-latinistes, méfiez-vous (« cavete ! », dirait-on en latin…) : vos camarades de l’option latin ont à leur disposition des ressources puissantes et insoupçonnées… Mieux vaut ne pas se moquer d’eux lorsqu’ils finissent les cours plus tard que vous, ou ne pas s’en prendre à leurs affaires…! Il pourrait vous arriver malheur…
D’ailleurs, certain.e.s sont devenu.e.s très versé.e.s dans l’art antique de la sorcellerie : c’est le cas de Carla qui ne s’est pas arrêtée à une simple tablette de défixion, ou à une poupée d’argile, mais qui a carrément… réalisé un film ! Elle s’est inspirée pour cela de notre lecture du roman d’Apulée et de notre étude de la magie antique, et a laissé parler sa créativité… Le résultat, impressionnant, ci-dessous. Bravo à elle !